Alors que le « Dry january », campagne du mois de janvier, permet de faire le point sur sa consommation d’alcool, que proposer aux personnes dépendantes ? Peut-on soigner l’alcoolisme par une molécule ? Éclairage avec le Dr Henri Gomez, psychiatre alcoologue à Toulouse.
"La problématique alcoolique apparaît lorsque la personne se trouve dans l’incapacité de gérer sa consommation d’alcool mais aussi lorsque l’alcool prend un statut de médicament ou de drogue avec recherche d’un effet anxiolytique", explique en préambule le Dr Henri Gomez, psychiatre alcoologue à Toulouse.
"Les patients viennent nous voir en moyenne cinq ans après avoir constaté leur perte de contrôle. La première difficulté est de faire accepter l’interruption de la consommation d’alcool. Le soin ne peut pas se réduire à un diagnostic et une prescription, l’alcoologie n’est pas une médecine d’algorithme, c’est une médecine lente et aucune méthode ne fait consensus.
Baclofène, "cures de dégoût", anxiolytiques
Le Baclofène a été la molécule la plus médiatisée et elle a créé l’illusion parce que le corps médical est complètement démuni sur cette question. Ce médicament peut être efficace à forte dose, au mieux en appoint et lorsque le patient accepte de s’investir. Mais il ne règle rien sur le fond, je préfère encourager à boire moins. Des anxiolytiques ou des régulateurs d’humeurs peuvent aider au démarrage du sevrage, mais, attention, il n’est pas question d’ajouter une dépendance aux benzodiazépines.
L’Espéral (ou Disulfirame) a été utilisé de façon absurde dans les historiques cures de dégoût. Associé à un verre d’alcool, ce médicament déclenche des effets indésirables tels que vomissements, palpitations, maux de tête. Cet effet dissuasif peut aider le thérapeute à montrer qu’il est possible de réussir à passer une journée sans alcool. C’est sans doute la molécule la plus utile, un jour à la fois, dans les premiers mois d’une démarche visant à éviter toute consommation d’alcool. Mais cette prescription ne guérit rien, son utilisation est laissée à la liberté du sujet et si l’alcool revient, le dialogue entre le thérapeute et son patient va s’interrompre.
L’alcoolique recherche des effets, il faut reconfigurer son système de récompense et l’aider à déculpabiliser, par exemple avec l’aide de la psychothérapie individuelle et du travail de groupe. Le pari du soin peut devenir une belle aventure. L’abstinence n’est alors plus vécue comme une amputation mais comme un gain de possibilité", conclut le Dr Henri Gomez.
Source: https://www.ladepeche.fr/2023/02/01/vrai-ou-faux-peut-on-soigner-lalcoolisme-par-un-medicament-10946450.php
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